Assurer l'accès aux soins à toute la population et une distribution équitable des investissements d'une région à l'autre : voilà les enjeux de demain !
La médecine hautement spécialisée est coûteuse. Elle exige des équipements sophistiqués et une formation pointue des équipes médicales. Celles-ci doivent aussi pouvoir traiter suffisamment de cas pour que leur expérience soit à la hauteur de leurs compétences. C'est la raison de la concentration en cours des centres de médecine hautement spécialisée dans notre pays.
Une médecine hautement spécialisée pour tous
Encore faut-il que la médecine hautement spécialisée soit judicieusement répartie entre les principales agglomérations et régions du pays. Pour assurer l'accès aux soins à l'ensemble de la population et une distribution équitable des investissements d'une région à l'autre.
Les critères de répartition devraient donc être particulièrement clairs. On en est loin. En l'état, la médecine hautement spécialisée comprend les domaines et les prestations qui se caractérisent « par la rareté de l'intervention, par leur haut potentiel d'innovation, par un investissement humain ou technique élevé ou par des méthodes de traitement complexes ». Soit. Mais à partir de combien de cas par an une intervention n'est-elle plus jugée rare ? Sur quelle base un traitement est-il jugé complexe ? Etc. Il conviendrait d'établir une liste précise, le cas échéant évolutive, des actes qui relèvent de la médecine hautement spécialisée.
Le contrôle parlementaire est par ailleurs inexistant dans ce domaine. Les décisions sont prises par un organe - l'organe de décision - issu de la Conférence des directeurs cantonaux de la santé, à la demande d'un organe scientifique d'une quinzaine d'experts. Cette procédure résulte d'une convention intercantonale conclue en 2008. Première conséquence : le Parlement fédéral n'est pas compétent en matière de surveillance puisque l'organisation de la médecine hautement spécialisée relève principalement des cantons. Deuxième conséquence : le Grand Conseil d'un canton ne peut pas exercer de surveillance parlementaire directe sur l'organe de décision dès lors qu'il s'agit d'un organe intercantonal. En clair, l'organisation de la médecine hautement spécialisée échappe aujourd'hui à tout contrôle parlementaire.
Et pendant ce temps à Berne
J'ai déposé plusieurs interpellations au Conseil national concernant cette situation. Malheureusement, les réponses du Conseil fédéral ne sont pas satisfaisantes. Celui-ci a cependant fait savoir que le Département fédéral de l'intérieur avait prié la Conférence des directeurs cantonaux de la santé d'établir un rapport « pour faire le point sur la situation et les étapes à venir ». Cet état des lieux servira de base à l'élaboration d'un autre rapport qui portera sur l'avancement de la planification et sur l'éventuelle nécessité pour le Conseil fédéral d'intervenir. Dans sa grande bienveillance, le Conseil fédéral ajoute qu'il « est soumis, dans le domaine de la médecine hautement spécialisée, à la haute surveillance du Parlement. Cette compétence (…) n'induit toutefois pas le transfert au parlement de la haute surveillance sur l'organe de décision, le Conseil fédéral n'étant pas habilité à agir par l'organe de décision, mais en lieu et place de ce dernier ».
C'est une manière de dire - en langue de bois - que la surveillance parlementaire est un beau principe qui se perd quelque part dans les arcanes du pouvoir. Ce n'est pas admissible.
Olivier Feller
Conseiller national PLR Vaud
Article publié dans le Courrier du médecin vaudois du mois de mai 2015