Le soir du lundi de Pentecôte, quelques centaines de manifestants ont bloqué pendant une bonne heure les voies CFF dans les gares de Genève et de Lausanne. Le trafic en a été fortement perturbé: 80 trains supprimés et des retards considérables pour les autres. De nombreux trains n’ont par ailleurs pas pu rejoindre leur point de départ habituel et le trafic normal n’a pu être rétabli par les CFF que le lendemain en début d’après-midi. Sans parler évidemment des coûts engendrés par cette situation.
C’est la dernière «manifestation» des dérives du droit de manifester en Suisse à l’image de ce qui se passe dans d’autres pays, notamment en France. Le droit de manifester est un droit fondamental. Reconnu dans tout régime démocratique, il prolonge les droits de réunion et d’expression en permettant l’émergence collective d’une opinion. Il s’agit de faire valoir une revendication, défendre une cause, obtenir un changement. Autant dire que les régimes à vocation totalitaire n’aiment pas ça du tout.
Ce n’est pas une raison pour faire du droit de manifester le droit de faire n’importe quoi. Il y a des règles à respecter, à commencer par la demande d’autorisation, dont le but est de préserver l’ordre public. La manifestation de ce lundi de Pentecôte, dite «spontanée», s’est exonérée de cette obligation. Première dérive, qui n’est pas anodine.
Mais il y a plus grave. Manifester dans l’espace public, en défilant dans la rue pour faire valoir son opinion au travers de slogans et de pancartes, pour se faire entendre des médias et des citoyens, ce n’est pas le droit de bloquer les moyens de transport ou d’occuper un bâtiment public ou privé. Quelle que soit la cause défendue – le climat, l’humanitaire – la liberté des uns ne doit pas entraver la liberté des autres. La manifestation de ce lundi de Pentecôte a violé cet autre principe fondamental dans une société démocratique. Deuxième dérive, qui tend à devenir une habitude.
Ce genre de manifestants justifient leur comportement, au demeurant illégal, par la nécessité, selon eux, de «radicaliser» leur mouvement. Sans quoi, paraît-il, rien ne bougerait. Ce qui est à la fois faux et inacceptable. Faux, parce qu’il n’est heureusement pas nécessaire de recourir à ces extrémités pour qu’une cause soit entendue. Il arrive même souvent que ces «radicalisations» finissent par nuire à l’objectif recherché. Et inacceptable, car le but d’une manifestation est de faire valoir un point de vue, non de l’imposer.
Le comble, c’est de revendiquer à la fois cette radicalisation et le «calme», le côté «pacifique» d’une manifestation illégale. Comme si nous devions être heureux que ce lundi de Pentecôte ne se soit pas traduit par des dégradations dans les gares, des vitres de magasins brisées, des voitures incendiées. Pardon, mais c’est la moindre des choses. Et il n’en reste pas moins que bloquer les moyens de transport ou occuper un bâtiment n’est pas innocent. Ce n’est pas «pacifique». C’est une forme d’intimidation et de violence.
Olivier Feller
Conseiller national PLR Vaud
Article publié dans Vaudois! du 25 juin 2025