Cette motion est le fruit d'une réflexion menée en commun par des députés issus de plusieurs partis politiques. Elle se veut rassembleuse: rédigée par le député vert Jean-Yves Pidoux, elle est signée par un représentant de chaque parti représenté au Grand Conseil.
Le sujet de l’enseignement de la musique dans des écoles non-professionnelles a déjà souvent fait l’objet d’interventions portées devant le Grand Conseil. Depuis près de 10 ans, interpellations et postulats se sont succédé, rapports et pétitions ont été également adressés à l’autorité politique – qui a pour son compte procédé à une consultation sur le sujet. L’interpellation de Madame la députée Josiane Aubert, déposée au début 2004 (04/INT/163), fait la liste de ces interventions et rappelle les bases légales et constitutionnelles de la politique culturelle.
Or, des éléments nouveaux fournissent une raison de remettre le dossier à l’agenda politique, et offrent au Grand Conseil l’occasion de réaffirmer son attachement à l’enseignement de la musique, tel qu’il est prodigué dans les conservatoires et les écoles de musique:
- En effet, un groupe de travail va être constitué, à l’initiative semble-t-il du DFJ, qui réunit des représentants de milieux musicaux et politiques, tant cantonaux que communaux. Le cahier des charges et les échéances du travail de ce groupe ne sont pas connus des signataires de cette motion.
- Les partenaires sociaux, représentant l’Association Vaudoise des Conservatoires et Ecoles de Musique (AVCEM, employeurs) et l’Association Vaudoise des Enseignants de Musique – Syndicat des Services Publics (AVEM-SSP, employés) négocient actuellement les termes d’une convention collective de travail pour les enseignants travaillant dans les écoles de musique membres de l’AVCEM.
Dans ces circonstances, les soussignés estiment que la situation est mûre pour qu’une nouvelle impulsion politique soit donnée. Ils demandent donc, par voie de motion, qu’une loi soit élaborée, qui régirait la question de l’enseignement musical dans le canton.
En tout état de cause, les subventions versées à l’AVCEM (rubrique 271.3652 dans le budget 2005, d’un montant de Fr. 1'390'000) et à la SCMV (Société cantonale des musiques vaudoises, Fr. 135'000 en 2005) doivent désormais reposer sur une base légale détaillée selon l’article 11 de la nouvelle Loi sur les subventions, votée en février 2005 par ce Grand Conseil.
La situation se présente actuellement de la manière suivante : l’AVCEM regroupe 21 écoles, qui accueillent 12'000 élèves ; la SCMV regroupe quant à elle 74 écoles pour 2'500 élèves. Ces écoles sont réparties sur l’ensemble du territoire cantonal. Quand bien même elles accomplissent des tâches très comparables, voire identiques, elles bénéficient d’un soutien public communal, voire cantonal, très variable. Cette inégalité de traitement n’est guère compatible avec les principes de base qui régissent l’Etat de droit. Sur le plan pratique, elle débouche d’ailleurs sur des situations fâcheuses. Ainsi, les différences dans les écolages perçus auprès des parents d’élèves varient du simple au triple selon les écoles. A cela s’ajoutent celles liées au domicile des parents, si ceux-ci ne résident pas dans la commune hébergeant l’école de musique. Les disparités salariales qui règnent dans les différentes écoles de musique du canton sont également très marquées : des enseignants diplômés peuvent, selon l’établissement où ils travaillent, obtenir des salaires minimaux qui vont du simple au double, et des salaires réels dont les variations vont du simple au triple. Les plus bas de ces salaires sont au-dessous du RMR – alors que les personnes concernées ont obtenu un diplôme équivalent à un titre d’une haute école spécialisée. A quoi s’ajoutent que les enseignants de musique ne bénéficient souvent pas de couverture LPP, parce qu’ils cumulent plusieurs emplois qui sont tous au dessous des minima légaux.
Il appartient à l’autorité politique de viser à l’égalité de traitement entre ces professionnels, ainsi qu’entre enfants des différentes régions, qui doivent pouvoir accéder à un enseignement de musique de qualité et de coût équivalent quel que soit leur lieu de résidence. D’où l’importance de la rédaction d’une loi vaudoise, qui pourra s’inspirer des options prises par les autorités bernoises. La Berne cantonale voit en effet, comme le canton de Vaud, cohabiter conservatoire professionnel et écoles de musique. Un décret, voté par le Grand Conseil bernois en 1983 et révisé en 1998, montre une piste possible de résolution du problème. S’inspirant du décret bernois, la loi vaudoise pourrait aborder et régler les questions suivantes:
- définition des écoles et critères pour la reconnaissance officielle de celles-ci (pour mémoire, les statuts de l’AVCEM fournissent, en leur article 6 et dans les directives qui leur sont annexées, quelques critères dont la loi pourrait également s’inspirer);
- tâches de ces établissements : offre d’enseignement et qualifications des enseignants recrutés;
- principes du financement; tâches déterminantes pour l’octroi d’un soutien public ; règles de calcul et de répartition de celui-ci entre canton, communes (en tenant compte du fait que celles-ci peuvent ou non héberger une école sur leur territoire, et qu’y sont ou non domiciliés des élèves) et particuliers;
- les motionnaires relèvent également que les relations entre écoles de musiques et conservatoire professionnel (i.e. Haute école de musique) pourraient devoir être abordées dans la loi qu’ils appellent de leurs vœux (les lois sur les hautes écoles restant réservées).
Répétons que le moment est bienvenu pour un geste politique : les relations entre les associations d’employeurs et d’employés sont au dialogue et à la négociation, l’autorité exécutive a pris la mesure du problème et veut favoriser les solutions concertées.
Une motion soutenue par des députés représentant l’ensemble des forces politiques du Parlement témoigne de l’importance que ce dernier attache à l’objectif d’un financement de l’enseignement de la musique qui serait à la fois équitable et supportable pour toutes les parties concernées: canton, communes et parents astreints au paiement d’un écolage.
Le problème étant urgent, les signataires préfèrent le renvoi direct de cette motion au Conseil d’Etat. Surtout, ils insistent vivement pour que les délais légaux prévus par la Loi sur le Grand Conseil (art. 134 LGC) soient respectés.
Jean-Yves Pidoux (Vert)
Jacqueline Bottlang Pittet (PDC)
Bertrand Clot (UDC)
Olivier Feller (radical)
Olivier Forel (POP)
Xavier Koeb (socialiste)
Eliane Rey (libérale)